Retraites : Yaël Braun-Pivet va faire barrage à l’abrogation des 64 ans

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Il n’y aura donc pas d’examen de l’abrogation des 64 ans. La présidente de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet a annoncé qu’elle ferait barrage à l’examen de la mesure d’abrogation des 64 ans.

Yaël Braun-Pivet (Renaissance, majorité présidentielle) a déclaré sur BFMTV : « Sur ces amendements de rétablissement de l’article 1 [qui prévoit de revenir à 62 ans], je suis très claire : ils seront déclarés irrecevables par moi-même dans la journée. » Avant d’ajouter : « J’applique la règle, rien que la règle », faisant référence à l’article 40 de la Constitution qui interdit toute proposition parlementaire créant une charge pour les finances publiques.

 

Le reste de la proposition de loi, portée par le groupe de députés indépendant Liot et soutenue par la plupart des oppositions, pourra tout de même être examiné. Cependant, il ne pourra pas y avoir de vote sur sa mesure-phare qui visait à abroger le recul de l’âge légal de départ de 62 à 64 ans.

Même si la participation à la 14e journée de mobilisation a été la plus faible enregistrée en cinq mois de manifestations, le texte Liot avait ravivé la flamme des opposants à la réforme promulguée mi-avril.

Une « Irrecevabilité financière« 

L’annonce de la présidente de l’Assemblée n’est pas une surprise puisqu’elle avait plusieurs fois qualifiée d' »inconstitutionnelle » l’abrogation des 64 ans. Cette proposition avait été retoquée la semaine dernière en commission, au terme d’un vote serré (38 voix contre 34), mais les oppositions comptaient déposer des « amendements de rétablissement ». C’est à ces derniers que va faire obstacle Yaël Braun-Pivet, comme l’y autorise le règlement de l’institution.

Le texte du groupe Liot aurait un coûterait « plus de 15 milliards d’euros au bas mot« , a assuré le camp présidentiel. De nombreuses voix ont reproché en coulisses à Mme Braun-Pivet de ne pas avoir invoqué plus tôt l' »irrecevabilité financière« .

Amendements alternatifs

Mais déjà résignés quant à l’impossibilité de voter sur la mesure d’abrogation, le groupe et la gauche ont déposé une série d’amendements alternatifs avec l’objectif qu’un scrutin symbolique ait tout de même lieu autour des mesures d’âge. Certains proposent, par exemple, d’établir « un objectif d’abrogation » des 64 ans à l’horizon 2024.

Le dépôt d’une nouvelle motion de censure contre le gouvernement a aussi été annoncé par les députés de La France Insoumise, a annoncé Mathilde Panot. La députée a dénoncé « des précédents extrêmements dangereux pour la démocratie ».  « La lutte continuera », a promis le leader Jean-Luc Mélenchon, sans savoir « sous quelle forme ».

Des réactions violentes

Mais la Nupes a crié au scandale mercredi. « Ils ont peur de perdre donc ils veulent empêcher les députés de voter », a tweeté le coordinateur de La France insoumise Manuel Bompard.

« Il y a une chose qu’il ne faut pas faire dans la vie, c’est changer les règles du jeu au moment où vous êtes en train de perdre la partie », a ironisé la patronne des écologistes Marine Tondelier.

Le responsable socialiste Olivier Faure a, sur Public Sénat, annoncé quitter les discussions sur la réforme des institutions. « Je ne vais pas continuer à faire le guignol avec des gens qui me prennent pour un con ».

Porteur de la proposition de loi, le groupe Liot a quant à lui dénoncé « une attaque inédite contre les droits du Parlement », réalisée « sous la pression de l’exécutif ».

Yaël Braun-Pivet, une présidente bousculée et mal comprise

Yaël Braun-Pivet « a été mise sous pression. Par tout le monde« , dit un ministre. Elle sort bousculée, voire affaiblie, de la réforme des retraites. « Je prendrai mes responsabilités », avait répété l’intéressée, mais avec sa dernière décision sur les retraites, elle s’est mise la gauche à dos. « Les choses sont en train d’être abimées, notre capacité à travailler ensemble » est remise en question, estime le communiste Pierre Dharréville.

La Nupes boycotte désormais les réunions lancées par Mme Braun-Pivet, dénonçant « une supercherie« . Même menace du groupe Liot.  Du côté de Renaissance, l’épisode des retraites va aussi laisser des traces. « Elle a été mal comprise« , regrettent plusieurs au groupe majoritaire présidé par Aurore Bergé. « Ça a encore éloigné Emmanuel Macron et Yaël Braun-Pivet« , renchérit un autre.

Mais la présidente a tout de même gardé des soutiens à Renaissance. « Elle n’a qu’une boussole », la défense de l’Assemblée, loue Gilles Le Gendre. Et « se place au-dessus des groupes politiques avec un réel aplomb », salue Jean-Marc Zulesi.

L’accusation est particulièrement rude pour Mme Braun-Pivet, avocate de profession entrée en politique avec Emmanuel Macron, qui a défendu « un Parlement renforcé » sous le précédent mandat, quand elle était alors présidente de la commission des Lois.

Elue au Perchoir en juin 2022, elle avait depuis montré des signes d’indépendance. « Je suis une femme libre. Les décisions que je prends le sont pour le bien de l’institution », a assuré la première femme présidente de l’Assemblée, au quotidien Ouest-France.

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