Il y a 50 ans, le 23 juillet 1974 était créé le premier secrétariat d’État à la condition féminine. À sa tête, Françoise Giroud va dresser un catalogue de mesures dont certaines ne sont toujours pas complètement appliquées.
Une nouveauté de l’État
Né sous l’impulsion du président Valéry Giscard d’Estaing, six ans après mai 68, ce premier secrétariat “était une idée complètement novatrice”, déclarait Sylvie Pierre-Brossolette, alors toute jeune chargée de cabinet auprès de Françoise Giroud, figure du journalisme et ancienne dirigeante du HCE. Son objectif principal était de réduire les discriminations et de promouvoir l’égalité des femmes. Le 2 octobre 1974, Françoise Giroud crée cinq groupes de travail dont les sujets sont toujours pour beaucoup d’actualité : les femmes en milieu rural, les discriminations juridiques, les mutations professionnelles et les problèmes posés aux couples, le développement du sport féminin et la place des femmes dans les structures politiques.
En 1976, il faut dire que seulement 53% des femmes travaillent (80% en 2024), deux tiers gagnent moins de 2000 francs par mois et elles occupent rarement des postes à responsabilité.
L’éducation comme vecteur d’égalité
En mai 1976, en conseil des ministres, cent mesures concrètes couvrant tous les aspects de la vie des femmes, de la naissance à la vieillesse, ont été présentées. Elles sont créées pour conduire les femmes au même “niveau de formation, de rétribution, d’intégration à la vie sociale et économique et de responsabilité” que les hommes. Ces mesures se mettent en place dans les crèches et les cantines pour faciliter le lien entre vie privée et professionnelle des femmes.
De plus, du côté de l’éducation, les jeunes filles sont encouragées à faire des formations techniques et valorisées. Un programme de formation pour les mères de famille est créé via la télévision. Pour Françoise Giroud, il n’est plus question que les hommes seuls signent la déclaration de revenus ou gèrent les biens communs des époux; ce système est alors réformé. Elle réclame aussi que les listes aux élections municipales ne comportent pas plus de 85% d’hommes et veut inciter à davantage de promotions féminines dans l’administration.
Réactions partagées : entre critiques féministes et défense de la coopération
“Historiquement, ça a été complètement oublié, parce qu’au même moment, Simone Veil (alors ministre de la Santé) défend la réforme de la contraception, puis de l’avortement au Parlement”, souligne Bibia Pavard, historienne des féminismes. Ces mesures étaient en retrait par rapport aux revendications féministes radicales du Mouvement de libération des femmes (MLF). La nomination de Françoise Giroud est reçue comme une tentative d’édulcorer les revendications de certaines féministes. Pourtant, cette dernière prône la coopération et la complémentarité entre femmes et hommes.
Un secrétariat sous pression : résistances et réalisations de Françoise Giroud
Le secrétariat d’Etat à la condition féminine a peu de soutien et peu de moyens. En effet, le Premier ministre de l’époque, Jacques Chirac, et le gouvernement ne soutiennent pas vraiment le secrétariat d’État. Les cent mesures représentent “un gros travail de fond, pour garantir l’égalité par le droit, où il y avait encore des traces importantes de sexisme”, souligne l’historienne Bibia Pavard. Cependant, Françoise Giroud parvient à des résultats impressionnants malgré le manque de moyens et les fortes résistances.
D’ailleurs, madame Pierre-Brossolette rappelle que “beaucoup de choses qui nous paraissent évidentes aujourd’hui n’étaient pas acquises”. Il en reste d’ailleurs quelques-unes comme l’éducation sexuelle, les stéréotypes dans les manuels scolaires et l’égalité des salaires. La présidente du Haut Conseil à l’Égalité entre les femmes et les hommes (HCE) ajoute que l’éga-conditionnalité, c’est-à-dire mettre comme condition à la conclusion des marchés publics le respect de dispositions favorables aux femmes (égalité salariale, promotions…) ou encore un vrai “service public de la petite enfance”, est un réel besoin.
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