Il y a six mois, Emmanuel Macron a décidé d’inscrire la liberté de recourir à l’avortement dans la Constitution. La mesure est aujourd’hui en suspens. Les associations et la gauche s’alarment de la régression de ce droit aux États-Unis comme en Europe.
Le chef de l’État “a pris la parole le 8 mars dernier, depuis on n’a pas l’impression que cette question soit dans l’agenda du président de la République et du gouvernement”, souligne Sarah Durocher, présidente du Planning familial. Elle manifestera à Paris, comme d’autres organisations, à l’occasion de la journée internationale du droit à l’avortement.
La France, dans les pas des Etats-Unis ?
L’inquiétude émerge un an et demi après le choc produit par l’annulation de l’arrêt garantissant aux États-Unis le droit d’avorter sur tout le territoire. Les élus de la majorité en France et de la gauche veulent éviter une telle régression dans l’Hexagone. Pourtant, le soufflé semble être retombé du point de vue de l’exécutif. La question de l’inscription de l’IVG dans la Constitution a été débattue au Parlement via une proposition de loi adoptée en première lecture à l’Assemblée nationale puis au Sénat après modification. Il est désormais question de “liberté” des femmes à recourir à l’avortement et non de “droit” comme le prévoyait le texte initial.
Le projet de “liberté” d’avorter stagne en France
Emmanuel Macron a affirmé en mars sa volonté d’inscrire “la liberté” des femmes d’avoir recours à ce droit dans la Constitution, dans le cadre d’une grande réforme institutionnelle. Mais depuis, l’initiative est à l’arrêt et ses défenseurs craignent qu’elle se retrouve prise au piège d’une réforme globale des institutions qui est loin de faire l’unanimité. Aucune indication n’est donnée par la navette parlementaire. Pas de réponse non plus pour le projet de loi de révision constitutionnelle. Mais rien ne devrait être acté avant une nouvelle rencontre entre Emmanuel Macron et les chefs des différents partis politiques, mais aucune date n’est fixée pour l’heure.
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Pour la sénatrice écologiste Mélanie Vogel, mettre la question de l’IVG dans une réforme plus globale illustre un “manque de volonté politique”. Pour être adoptée, la loi devra être approuvée par 3/5ème des membres du Parlement réunis en Congrès : la sénatrice dénonce une forme de “cynisme”. “C’est mettre une proposition consensuelle dans un véhicule qui va se crasher dans le mur”, estime l’élue. “Mettre les parlementaires dans une situation de devoir voter sur des choses qui n’ont aucun rapport, c’est garantir l’échec du projet”.
L’avortement: menacé en Pologne, en Hongrie et en Italie
L’inscription de l’IVG dans la Constitution, compliquerait toute tentative du législateur de supprimer ce droit ou d’y porter gravement atteinte, soulignent ses défenseurs. “On n’en est pas au même stade qu’aux États-Unis mais on voit des restrictions sur le droit à l’avortement en Pologne ou encore en Hongrie et ça ne devrait pas tarder en Italie avec l’arrivée de l’extrême droite au pouvoir”, note Sarah Durocher.
“Pourquoi en France y aurait-il une exception, comment peut-on se dire que l’avortement ne peut pas être menacé en France?”, ajoute-t-elle. Elle cite les récentes attaques lancées contre des antennes du planning familial et la “désinformation” orchestrée par les mouvements “anti-choix”.
Selon un sondage publié en novembre 2022 par l’Ifop, près de neuf Français sur dix (86%) sont favorables à l’inscription du droit à l’IVG dans la Constitution. Les derniers chiffres officiels font état d’un nombre d’IVG en hausse en 2022 (234.000) après deux années consécutives de baisse.