Viol collectif : les mentalités évoluent en Inde

AccueilNewsViol collectif : les mentalités évoluent en Inde

Mathéa Mierdl

#5000VOICES
06123456789

Après avoir survécu à un viol collectif, Kiran une jeune enfant de 13 ans doit faire face au phénomène de blâme des victimes. À son jeune âge, elle décide de se mobiliser pour faire changer la honte de camp.

Toute une communauté impactée

Trois hommes sont condamnés à 25 ans de prison chacun pour le viol collectif d’une adolescente Jharkhand, un petit village dans le nord-est de l’Inde en 2017. Pendant 14 mois, entre l’attaque et le verdict, la communauté ostracise, menace et diffame la famille de Kiran, 13 ans, alors qu’elle cherche à obtenir justice. Son histoire est racontée dans le documentaire To Kill A Tiger, nommé aux Oscars. Ce viol collectif marque un tournant dans cette région rurale.

Le procès de ce crime est historique dans ce petit village d’Inde. Il provoque un changement et un éveil culturel immédiat. Alors que les voisins exhortaient le père de Kiran, à marier sa fille à l’un de ses agresseurs pour éviter le « déshonneur » de la famille, ils reconnaissent désormais leur erreur. Les hommes et les garçons cessent de se moquer et d’objectifier les femmes. « La sévérité de la peine les secoue ; ils comprennent que leur comportement doit changer », explique Ranjit, le père de Kiran. Ranjit est satisfait de voir que ce malheur a mené à une amélioration des conditions de vie pour les femmes. « Les modifient leur attitude envers les femmes, et la sécurité dans le village s’améliore. »

Aujourd’hui, Kiran a 21 ans et poursuit sa troisième année d’études, elle espère devenir inspectrice de police. « Je serais la première femme inspectrice de mon village, c’est essentiel », affirme la jeune femme. Son courage inspire les filles de son village à poursuivre leurs études et à s’habiller librement. Son parcours montre qu’un changement profond est possible, même dans des sociétés ancrées dans des traditions rigides.

Une voix pour le changement

Désormais, Kiran utilise son expérience pour sensibiliser le monde à la violence sexiste. Elle devient porte-parole de #Standwithher, une initiative internationale pour la justice de genre. Cette initiative a été lancée à New York à la suite d’une projection de To Kill A Tiger par ONU Femmes. Le tournage de ce documentaire réunit Kiran, son père, la réalisatrice Nisha Pahuja, Ziauddin Yousafzai (père de Malala) et des représentants d’organisations comme Equality Now et Equimundo. « Je veux toucher plus de gens et faire comprendre que le système juridique doit encourager les victimes à se manifester », affirme la jeune femme.

Nisha Pahuja révèle que ce documentaire répond à trois objectifs. Tout d’abord il s’agit de soutenir les survivants. De plus, il est important de sensibiliser les hommes et les garçons à l’impact du patriarcat. Enfin l’objectif final est d’introduire un programme anti-violence dans 50 000 écoles aux États-Unis avant de l’étendre à l’international. « Cette histoire a le pouvoir d’unir les gens. Kiran a réussi à déplacer la honte, en la mettant là où elle doit être. »

Après son séjour aux États-Unis, Kiran rentrera en Inde pour rejoindre l’Orange Ribbon Survivor Coalition. Ce groupe lutte contre les tabous sociaux qui empêchent les victimes de parler. Le nom s’inspire des rubans que Kiran porte dans ses cheveux au début de To Kill A Tiger. Aujourd’hui, il sont devenus un symbole de sa force. Selon Kiran, la force et le courage sont des armes essentiels à 13 ans pour porter plainte et affronter les intimidations, elle répond : « La situation vous oblige à être fort. J’ai compris que si je ne faisais rien, personne ne le ferait. Ma force vient de mon besoin de me protéger. »

À lire aussi : Texas : une sage-femme inculpée pour avortements illégaux

Découvrez aussi