Le 5ème rapport annuel sur l’état du sexisme en France émis par le Haut Conseil à l’Égalité (HCE) montre que le sexisme ne recule pas dans le pays. Au contraire, les violences s’aggravent, et les jeunes générations sont les plus touchées, “La situation est alarmante”.
Heureusement, certains progrès ont été enregistrés en 2022 avec notamment des nominations significatives en politique avec l’élection d’Elisabeth Borne comme Première ministre et en économie avec la nomination de Marie – Anne Barbat-Layani comme présidente de l’Autorité des marchés financiers. De nouveaux moyens de lutte contre les violences ont également été mis en place (mesures du Grenelle des violences conjugales…) et de nouvelles dispositions favorables aux femmes ont permis des avancées importantes (contraception gratuite pour les moins de 25 ans, délai d’IVG allongé, PMA pour toutes, entrée en application de la loi Rixain, extension des domaines de l’égaconditionnalité dans la culture).
Beaucoup de progrès restent à faire
Mais le rapport dresse toujours le constat d’une société française très sexiste, dans toutes son étendue. “Oui ce rapport est alarmant, il y a de quoi lancer une alerte aux pouvoirs publiques.”, constate la journaliste et présidente du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, Sylvie Pierre-Brossolette au micro de France Inter. Alors que 57 % des femmes ont déjà subi des blagues ou remarques sexistes, 23 % des femmes ont vécu un écart de salaire avec un collègue homme à poste égal ou compétences égales. Les derniers chiffres du ministère de l’Intérieur indiquent également une augmentation de 21 % du nombre de victimes de violences conjugales entre 2020 et 2021. Le rapport pointe également un décalage entre perception, déclaration et pratiques. “L’opinion reconnait et déplore la pratique du sexisme mais ne la rejette pas dans la pratique.”, soulève le rapport. 16 % des hommes pensent encore qu’une femme agressée sexuellement peut en partie être responsable de sa situation. Ce décalage entre perception, déclarations et pratique a des conséquences tangibles en termes de violence symbolique, physique, sexuelle, économique. Encore aujourd’hui, 35% des femmes n’osent pas demander une promotion ou une augmentation.
Autre problème de taille : le rapport met également en évidence un manque de confiance des personnes interrogées à l’égard des pouvoirs publics portant la lutte contre le sexisme et l’inefficacité des outils mis en place. En conséquence, les femmes sont réticentes à l’idée de porter plainte par peur de ne pas être crues ou d’être accusées d’avoir provoqué les agressions dont elles sont victimes. Un gros problème lorsque, selon le rapport du HCE, 37% des femmes ont déjà subi un rapport sexuel non consenti et qu’1/4 des hommes de moins de 35 ans estiment qu’il faut parfois être violent pour se faire respecter.
Des pistes d’amélioration
Le HCE propose des pistes d’action en urgence pour enrayer ce phénomène. Parmi elles : Dégenrer les jouets destinés aux enfants dès la naissance. Effectivement, Sylvie Pierre-Brossolette le rappelle : “Il faut prendre le mal à la racine, combattre le sexisme dès le plus jeune âge, les jeunes hommes sont complètement influencés par ce qu’ils regardent”. Le rapport conseille d’ailleurs de renforcer la lutte contre la diffusion de contenus pornographiques illicites. Autres propositions : Institutionnaliser une journée nationale de lutte contre le sexisme, concevoir et mettre en oeuvre un plan national visant à assurer la sécurité des jeunes femmes dans la rue à proximité des établissements scolaires ou encore Garantir une permanence d’accueil des victimes par une personne dédiée dans chaque commissariat de police et brigade de gendarmerie et assurer un accompagnement médical et psychologique gratuit à toutes les femmes victimes de violence.
La fondatrice de la Fondation des femmes, Anne-Cécile Mailfert, tient tout de même à soulever un point positif : “ces chiffres sont bien évidemment alarmants mais ils montrent au moins que les femmes commencent à prendre conscience et à nommer le sexisme qu’elles subissent.” Elle tient également à rappeler que la lutte contre le sexisme n’est pas qu’une affaire de femmes. “C’est aux hommes de bouger.“, exige-t-elle. Selon elle, “l’Arcom ne fait pas ce qu’il faut sur l’accès des mineurs à la pornographie. On est sur une génération qui depuis l’âge de 12-13 ans, peut accéder à du porno tous les jours. Et quel genre d’images ils voient, du contenu ultra-violent d’humiliation des femmes.” Un tiers de la bande passante en France est consacrée à regarder du porno, rappelle Sylvie-Pierre Brossolette.
Sylvie Pierre-Brossolette, doit être reçue par le président Emmanuel Macron mercredi 25 janvier, à l’occasion de la Journée contre le sexisme. L’instance consultative indépendante, qui fête ses dix ans, participera cette semaine à une campagne de sensibilisation et ouvrira mercredi un “procès contre le sexisme”, organisé par le collectif Ensemble contre le sexisme, qui sera clos par la ministre chargée de l’Egalité hommes-femmes, Isabelle Rome.