Le 12 octobre 2024, l’Assemblée nationale crée une Commission d’enquête relative aux violences commises dans le milieu du cinéma, de l’audiovisuel, du spectacle vivant, de la mode et de la publicité. Sous la présidence de Sandrine Rousseau, Erwan Balanant a été nommé rapporteur. Face aux parlementaires, ils présentent le rapport de cette Commission d’enquête.
Dénonciation de la protection des bourreaux
Le verdict est sans appel. Dans un rapport accablant, la Commission d’enquête parlementaire présidé par Sandrine Rousseau révèle un secret de polichinelle. Rapporté par Erwan Balanant, le rapport dénonce les violences sexistes, sexuelles ou morales qui gangrènent le cinéma et les autres milieux de la culture. Au fil de centaines d’auditions et de témoignages, le document, enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale le 2 avril 2025, dresse un constat glaçant : ces milieux cultivent un entre-soi où l’impunité règne et où la parole des victimes est trop souvent réduite au silence. La commission met en lumière une mécanique bien huilée : des environnements précaires, hiérarchisés à l’extrême, où la dépendance économique et le culte du génie créateur favorisent les abus. Le talent devient une monnaie de pouvoir, l’admiration elle, un terrain fertile à la manipulation.
Le rapport recense une multitude de faits, tous plus choquants les uns que les autres. Les témoignages affluent : ceux d’actrices manipulées, de techniciennes humiliées, de mineures livrées à la brutalité d’un système qui les broie. Les noms des victimes, Adèle Haenel, Judith Godrèche, Anna Mouglalis, Sara Forestier, résonnent comme des alertes. Leurs voix brisées dénoncent une industrie qui sacrifie les femmes sur l’autel de la création. Si le mouvement MeToo initie un frémissement, il peine à faire tomber les bastions de l’omerta. L’industrie continue de protéger les bourreaux, quand elle ne les célèbre pas. Le rapport de la Commission d’enquête pointe la complaisance persistante des institutions, des chaînes de télévision et même de l’État. Certains mis en cause restent décorés, d’autres conservent leurs postes. Une sidérante inertie qui soulève une question simple : que vaut la parole d’une victime face à l’aura d’un homme célèbre, d’un auteur, d’un réalisateur ?
Principales recommandations du rapport
Le rapport ne se contente pas d’alerter. Il propose une batterie de recommandations pour lutter contre ce fléau. Il propose de généraliser la formation contre les violences sexistes et sexuelles. Aussi, la mise en place de dispositifs de prévention, ou encore de coordinateurs d’intimité sur les plateaux permettrait de prévenir les agressions. La nécessité d’une vaste enquête de victimation devient urgente, afin de mesurer l’ampleur réelle des abus, encore largement sous-estimée. Puisque les enfants aussi font partie du milieu du spectacle le rapport propose plusieurs mesure pour les protéger. Il s’agit de mesures tel qu’étendre le cadre juridiques aux mineurs âgés de 16 à 18 ans, de prohiber la sexualité des mineurs à l’écran ou encore d’exiger la présence d’un responsable des enfants sur les lieux pour toutes les productions artistiques. Le rapporteur estime aussi indispensable de professionnaliser la fonction de référent Violences et Harcèlement Sexistes et Sexuelles, pour que tous puissent travailler en sécurité dans un environnement sain.
Le rapport se termine sur une mise en garde. Tant que les comportements déviants seront tolérés, justifiés ou niés au nom de la création artistique, les carrières continueront de se briser. Les talents vont s’éteindre, et les violences se répéter. La Commission conclut qu’il est temps que le monde de la culture cesse de se croire au-dessus des lois.