Une étudiante de Téhéran, victime de harcèlement par la milice Basidj, s’est déshabillée publiquement pour protester contre l’application abusive du port obligatoire du voile. Amnesty International demande sa libération immédiate et une enquête sur les violences subies lors de son arrestation.
Un acte héroïque devenu virale dans le monde
La vidéo de la jeune fille, largement difusée sur les réseaux sociaux, a provoqué une vague d’indignation et de soutien à travers l’Iran et au-delà. Une étudiante de l’université islamique Azad de Téhéran, dont l’identité demeure pour l’instant inconnue, s’est retrouvée en première ligne d’un nouvel épisode de résistance féminine. Selon plusieurs activistes iraniens, la jeune femme subissait du harcèlement récurrent de la part de la milice Basidj, affiliée aux Gardiens de la Révolution, une force paramilitaire connue pour son contrôle strict de la morale publique et la répression des voix dissidentes.
En réaction à ces intimidations, l’étudiante aurait choisi un moyen de protestation radical : se déshabiller publiquement devant son université, un geste fort dans un pays où les règles vestimentaires imposées aux femmes sont strictement surveillées par les autorités. Quelque temps avant, elle aurait été importunée par des forces de sécurité car elle ne portait pas de voile. Marchant en sous-vêtements, son acte a été capturé par des témoins, probablement depuis un immeuble voisin, et relayé par le site étudiant Amir Kabir. Cette séquence a ensuite circulé largement, relayée par des sites persans comme le groupe juridique Dadban, l’ONG de défense des droits humains Hengaw, et la plateforme d’information Iran Wire.
Jean-Noël Barrot, porte-parole de la diplomatie française, « salue le courage de cette jeune femme qui fait acte de résistance et s’est hissée au rang d’icône pour le combat des femmes en Iran, pour le combat des femmes partout où leurs droits sont menacés » a-t-il déclaré sur France 2.
L’indignation des organisations de défense des droits humains
Quelques instants après son acte de protestation, des images montrent la jeune femme forcée à monter dans une voiture par des hommes en civil, vraisemblablement des agents de sécurité. Le site Amir Kabir rapporte qu’elle a été violemment frappée durant cette arrestation, une information qui a suscité la réaction rapide d’Amnesty International. Par l’intermédiaire de sa branche iranienne, Amnesty a exigé sur X (anciennement Twitter) la libération immédiate et sans condition de l’étudiante. L’organisation a également demandé une enquête indépendante et impartiale sur les violences physiques et sexuelles dont la jeune femme aurait été victime lors de son interpellation. Ce nouvel incident s’ajoute à une longue série d’abus commis par les autorités iraniennes à l’encontre de femmes militantes et de protestataires, dans un contexte de répression accrue.
En réponse, l’agence de presse semi-officielle iranienne Fars a publié une photo floutée de l’étudiante en mentionnant qu’elle portait des « vêtements inappropriés » en classe et se serait « dévêtue » en réaction à des avertissements formulés par les agents de sécurité. Fars cite également des « témoins » affirmant que les agents de la milice Basidj auraient abordé la jeune femme de manière « calme » sans user de violence. Cette version contraste avec les témoignages partagés sur les réseaux sociaux et les rapports d’organisations de défense des droits humains.
Un climat de révolte toujours plus tendu depuis la mort de Mahsa Amini
Le cas de cette étudiante rappelle la persistance du mouvement de contestation féminine en Iran, qui a pris une ampleur inédite depuis la mort de Mahsa Amini en septembre 2022. La jeune Kurde de 22 ans est décédée alors qu’elle était en garde à vue, après avoir été arrêtée par la « police des mœurs » pour une prétendue infraction au code vestimentaire. Sa mort a déclenché une vague de manifestations sous le slogan « Femme, Vie, Liberté », mobilisant des milliers de femmes iraniennes et leurs alliés, qui réclament la fin des restrictions vestimentaires et un élargissement de leurs droits civils. En Iran, la loi impose le port du voile aux femmes sous peine de 10 ans de prison.
Face à ces mouvements, la répression gouvernementale s’est intensifiée. Des ONG estiment qu’au moins 551 personnes ont été tuées lors des manifestations de 2022 et des milliers d’autres ont été emprisonnées. Ce climat répressif n’a fait que renforcer la colère et la détermination de nombreuses femmes iraniennes à se mobiliser, en dépit des risques encourus. Le geste audacieux de cette étudiante s’inscrit dans cette dynamique de résistance, où des femmes de plus en plus nombreuses osent défier ouvertement les codes imposés par le régime au nom de leurs droits et de leur liberté.
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