« Je ne surfe pas sur la vague MeToo. Moi, la vague je me la suis prise en pleine gueule dès ma plus tendre enfance. » Ces mots percutants, prononcés par la comédienne Norma, résonnent comme un cri de vérité dans un monde où la parole des victimes d’inceste se libère peu à peu.
“Je fais des blagues sur des choses pas drôles”
À 31 ans, Norma a décidé de briser le silence qui l’a étouffée pendant des années, et elle le fait avec une force, un humour, et un décalage qui sont tout à fait uniques. Norma a survécu à un passé douloureux, marqué par des années de violences infligées par son grand-père par alliance. Son histoire a été partagée avec le monde dans le documentaire « Un silence si bruyant », co-réalisé par Emmanuelle Béart et Anastasia Mikova, qui a captivé environ un million de téléspectateurs lors de sa diffusion sur M6 dimanche soir. Mais Norma ne s’est pas contentée de partager son histoire, elle l’a transformée en un spectacle percutant intitulé « Norma(le) ».
Ce spectacle, joué cette année à Paris et au festival d’Avignon, offre au public un voyage intime à travers les « névroses » de Norma et sa résilience. Dans une interview avec l’AFP, Norma révèle que l’écriture de ce spectacle a été un acte magique, lui permettant de prendre du recul sur son passé douloureux. Elle a su trouver l’humour dans ses névroses devenues ubuesques, une manière de se sauver d’un drame qui aurait pu rester noyé dans le pathos. Sur scène, une photo d’elle à l’âge de six ans est posée sur une chaise, rappelant au public l’enfant qu’elle était avant que l’horreur ne s’abatte sur elle. Norma, vêtue de noir, fait jaillir les mots avec une force captivante. Elle se moque de son agresseur, surnommé « papy », un homme de 70 ans au visage inoffensif selon les voisins, mais qui la terrorisait chaque week-end et pendant les vacances scolaires, le tout avec l’émission « Thalassa » en arrière-plan.
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La résilience comme échappatoire
Cependant, le spectacle de Norma ne se limite pas à raconter son histoire de victime. Il s’agit avant tout d’un récit de résilience et de reconstruction. Elle partage son parcours pour retrouver la confiance en elle, la joie, le plaisir, des éléments qui lui semblaient presque inatteignables après des années d’inceste. Elle questionne également ce qu’est la normalité, sa propre grille de lecture ayant été altérée par les abus subis. Avec une touche d’ironie, Norma dépeint ses multiples rencontres avec des thérapeutes, de la « psy » à la naturopathe en passant par le chaman.
Elle rit de ses troubles obsessionnels compulsifs, comme se doucher frénétiquement lorsqu’elle est angoissée. Mais elle ne laisse pas le désespoir la submerger, concluant ses pensées suicidaires par une pirouette humoristique. Norma, à travers son spectacle, envoie un message puissant : il ne faut plus se taire. Elle encourage tous ceux qui ont besoin de parler à le faire, pour que la honte et la peur ne puissent plus être les alliées des agresseurs. Cette prise de parole courageuse s’inscrit dans la lignée de la Commission Inceste mise en place par le gouvernement, qui a récemment analysé des milliers de témoignages de victimes. Le chemin de Norma vers la justice n’a pas été facile, mais son agresseur a finalement été condamné à six mois de prison avec sursis il y a trois ans, grâce à sa détermination et à sa bravoure. Aujourd’hui, elle continue de briser le silence avec son spectacle, donnant de l’espoir à de nombreuses autres victimes et montrant au monde que la résilience peut triompher de l’obscurité.
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